18 avril 2016

Washoku / Le secret perdu des Japonais?


Washoku 和食 signifie littéralement "repas japonais" et par extension "cuisine japonaise". Composé de wa ("japonais" mais également "harmonie") et de shoku (nourriture), le washoku en opposition au yôshoku 洋食 (cuisine occidentale à la japonaise) revêt une portée toute particulière pour les Japonais.

En tant que demi-Belge, quand je prépare et mange une tartine, des boulettes de viande ou une soupe, je ressens bien sûr de la gourmandise et du plaisir mais rien de singulier en terme... spirituel?
Je ne suis pas certaine de trouver le mot exact pour vous décrire ce sentiment complexe sous-entendu à propos du washoku.

Lorsque l'on prend l'avion pour Tokyo, en poussant son trolley de plateaux-repas, l'hôtesse de l'air vous demande "washoku ou yôshoku?" (Japanese or Western meal?). Pour les non-Japonais, c'est l'heure de la découverte et de l'exotisme. Pour les Japonais et la demi-Japonaise que je suis, c'est un sentiment mêlé de nostalgie, de retour au pays, d'harmonie et de bien-être qui vous envahit. Je vous l'accorde, le plateau repas de l'avion n'est pas vraiment très bon mais c'est pour vous dire la force qu'exerce le washoku; j'en suis persuadée: il nourrit le corps et l'esprit.

Les habitudes alimentaires japonaises modernes tendent vers les mêmes travers qu'en Occident. Lentement mais sûrement. Et c'est bien dommage, car ce précieux héritage culturel qu'est le washoku, représente un rempart contre la malbouffe et l'obésité.

C'est un beau secret d'équilibre, de beauté et de goût que les Japonais détiennent là. Je le partage modestement avec vous, dans la mesure de ce que je connais et comprends de la cuisine familiale japonaise.

7 bonnes habitudes du washoku


En harmonie avec la nature et les saisons

Les saisons inspirent le menu. Des plats plus gras et réconfortants pour réchauffer le corps en hiver, des plats légers et frais en été pour lutter contre la chaleur... le washoku suit la logique et le rythme de la nature.
Mais ce qui importe avant tout, c'est certainement la fraîcheur des produits et le respect des saisons.
Comme je l'avais déjà abordé dans ce billetle washoku suit la règle du « ichijusansai » 一汁三菜: un potage (shirumono), trois accompagnements (okazu).

Ils sont frais mes légumes!

Le leitmotiv du frais et de saison vaut aussi pour les légumes.
Il n'est pas rare pour la ménagère de faire ses courses une fois par jour afin de profiter d'une fraîcheur optimale.
Pour mettre en valeur leur saveur naturelle, les légumes seront crus, à peine cuit pour rester croquants ou encore saisis à feu vif.
La mise en valeur visuelle occupe aussi une place importante, que ce soit dans la diversité des couleurs, des textures et même des formes de coupe.

A coup de baguettes

Généralement, tous les plats sont disposés au milieu de la table et chacun se sert de la quantité souhaitée.
Bien que les assiettes et les bols de la vaisselle japonaise soient relativement petits, lorsque vous vous êtes servi, vous serez étonné de voir votre appétit satisfait de la quantité rien que par le visuel. C'est varié, c'est coloré, c'est joli. On mange déjà rien qu'avec les yeux.
Les baguettes japonaises sont aussi un moyen élégant de manger plus lentement, moins et par petites bouchées.

Honneur à la mer

Les Japonais mangent très peu de viande. Ils lui préfèrent le poisson et ils ont bien raison avec les mers qui entourent leur archipel.
Peu de viande donc, peu de graisses et surtout très peu de graisses animales. Dans un washoku, la crème fraîche, le fromage et le beurre sont inexistants.
Les algues comme le nori, le wakame viennent compléter le menu, ainsi que des aliments fermentés dont le fameux miso.

Le riz, âme du Japon

Le riz, l'âme du Japon et socle du washoku: tout est dit, ou presque, ici.

De l'eau, du thé et encore du thé

Que serait le washoku sans le thé! Thé vert, sencha, genmaicha, mugicha, oolong cha... ce ne sont pas les variétés de thé qui manquent pour accompagner le repas. Une règle sacrée cependant: ne mettez jamais de sucre dans le thé japonais (le sucre n'est autorisé que dans le thé noir "anglais").

L'eau est également un élément essentiel dans la vie des Japonais. A l'instar de la carafe d'eau française, l'eau est systématiquement servie dans n'importe quel restaurant, en signe de bienvenue.

Je pense pouvoir dire que les Japonais ne consomment pas de boissons gazeuses (même de l'eau pétillante) en grande quantité au quotidien, et surtout pas au moment des repas (oui, le choix des boissons proposées dans les distributeurs automatiques est énorme mais la consommation de ces boissons reste ponctuelle). Personnellement, je n'ai jamais vu de bouteille de Coca-Cola dans le frigo d'une famille japonaise...

Quant à l'alcool, les Japonais ne possédant visiblement pas la gamme d'enzymes nécessaires à la "bonne absorption" de l'alcool, ils sont plus vite souls. En dehors de cet inconvénient, il me semble que les boissons alcoolisées sont réservées aux moments festifs et de détente, notamment lors de la beuverie de fin de semaine entre collègues afin de relâcher la pression.

Un dessert, kesako?

Le washoku ne comprend pas de dessert.
Les Japonais aiment bien sûr les douceurs sucrées mais l'habitude de clôturer le repas par un dessert n'existe simplement pas.

J'ajouterais un dernier élément qui ne fait pas partie du washoku mais qui contribue certainement à la forme et à la longévité des Japonais. Même s'ils possèdent souvent une voiture, les Japonais se déplacent la plupart du temps à pied, en vélo et en transport en commun. Marcher, se promener... une règle de vie bien connue des centenaires du village italien d'Acciaroli!

Pour passer enfin de la théorie à la pratique, voici en détails mon dernier washoku.
  • du saumon frais laqué au miso et sauce de soja et cuit au four.
  • des fleurs de brocolis cuites à l'eau mais encore croquantes et assaisonnées à l'huile de sésame (quelques gouttes) et au sel.
  • un demi-avocat assaisonné avec sel, poivre et jus de citron.
  • une petite salade de champignons crus, radis et concombre avec une vinaigrette japonaise (du commerce, sans huile. composition un peu bof mais j'adore le goût!).
  • un bol de riz

Itadakimasu!

6 commentaires:

  1. Je viens de découvrir ton magnifique blog ! Superbes ces recettes ! Bravo !
    Bises,
    Eva

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  2. Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.

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  3. C'est intéressant comme article.
    Cela dit, en ce qui nous concerne, mon compagnon et moi, quand on revient en Belgique après avoir passé des vacances à l'étranger, manger "belge" est la première chose que l'on fait, un retour aux sources (qui sont souvent la friterie ou un américain-frites, moins glamour et healthy, je l'accorde, mais symboliquement c'est un peu le même non ^^), donc je pense que cette nostalgie et cette importance que l'on accorde aux mets de son pays, et l'importance que l'on accorde à son pays tout court peuvent influencer notre façon de manger "de chez nous".

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    Réponses
    1. Oh oui, une envie subite d'américain frites, ça m'arrive aussi régulièrement! ;-)

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  4. Merci pour cet article très intéressant. J'avais déjà lu quelques éléments de la philosophie Wasahoku dans des ouvrages dédiés au Kaiseki. C'est ce côté spirituel que j'adore dans la cuisine japonaise, celui là même qui me fait prendre beaucoup de plaisir à laver soigneusement mon riz, à râper ma bonite, à préparer mon tonyu. De toucher cette façon de penser a littéralement changé mon rapport à la cuisine française et à ses produits.

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